Hiatus, lacunes et absences : identifier et interpréter les vides archéologiques
31 mai-4 juin 2021 Toulouse (France)
L'impact de l'École française en technologie lithique en Chine
Yuduan Zhou  1, *@  , Yinghua Li  2, *@  , Hubert Forestier  3, *@  
1 : Muséum National d'Histoire Naturelle, UMR 7194,CNRS-MNHN-UPVD
Muséum National d'Histoire Naturelle (MNHN)
1, rue René Panhard 75013 Paris -  France
2 : Département d'Histoire, Université de Wuhan
16, rue Luojiashan, 430072, Wuhan -  Chine
3 : Muséum National d'Histoire Naturelle, UMR 7194,CNRS-MNHN-UPVD
Muséum National d'Histoire Naturelle (MNHN)
Musée de l'Homme, 17 place du Trocadéro, 75116 Paris -  France
* : Auteur correspondant

La recherche paléolithique en Chine a pris son envol pendant l'Entre-deux-guerres, suite travaux pionniers français en Chine du Nord. En 1920, pour la première fois en Chine, le Père Émile Licent trouva trois pierres taillées dans les couches lœssique à Qingyang, au Nord-Ouest du pays. Les années qui suivirent, furent marquées par la découverte de nombreux sites sous l'impulsion d'une équipe franco-chinoise composée, côté français, d'Émile Licent et de Pierre Teilhard de Chardin. Certains de ces sites sont, depuis, devenus des références internationales prestigieuses pour la préhistoire et la paléoanthropologie comme, par exemple: Zhoukoudian, Salawusu, Nihewan ou Shuidonggou. Un des fondateurs de la discipline Paléolithique en Chine, le Pr. Pei Wenzhong, a même obtenu son doctorat en France en 1937 à l'IPH, sous la direction d'Henri Breuil alors « pape de la Préhistoire ». Ceci explique aussi, le lien académique et disciplinaire très fort entre la Chine et la France : une longue histoire scientifique commune qui se poursuit aujourd'hui en coopération avec le Muséum National d'Histoire Naturelle.

Suite à d'importants bouleversements sociaux et politiques qui ont marqué la Nouvelle Chine entre 1949 à 1978, les échanges scientifiques avec les pays occidentaux se sont arrêtés. Durant cette période, les recherches en préhistoire ont retrouvé autonomie, indépendance, et se sont recentrées autour d'études morpho-descriptives des outils de pierres taillée.

Il faudra attendre les deux dernières décennies du XXème siècle et la réouverture de la Chine à l'Occident, pour que des chercheurs français puissent être à nouveaux invités et transmettre l'apport théorique et pratique des Écoles de A. Leroi-Gourhan (Paris1) et de J. Tixier (Paris10-Nanterre).

Près de vingt ans sont passés et l'impact de l'École française est toujours d'actualité dans le domaine de la technologie lithique avec l'utilisation de concepts clés comme: la ‘‘chaîne opératoire'', le « schéma opératoire », « le schéma conceptuel », l'«économie du débitage et de la matière première». Plus récemment, l'analyse «techno-fonctionnelle» développée par Eric Boëda (Paris10-Nanterre) a été appliquée à des sites chinois compris entre 2,6 Ma et l'Holocène moyen (Longgupo, Guanyingdong, Maomaodong, les industries à bifaces, Hoabinhien, etc.). Le développement de cette méthode a aidé à clarifier le diagnostic de séries parfois très controversées, ce qui explique pourquoi l'École française a acquis un crédit solide dans le paysage académique chinois.

Toutefois, si le concept de « chaîne opératoire» a été globalement bien accepté par la communauté des lithiciens chinois, il n'en va pas de même pour l'orientation générale des études technologiques «à la française» qui ne font pas l'unanimité. Un vif débat scientifique a vu le jour ces dernières années, entre chercheurs «quantitativistes» et, une nouvelle génération de «qualitativistes» sur des thèmes aussi variés que: la pertinence du choix des méthodes, leur pertinence dans le diagnostic de l'artefact de pierre. Le réservoir exceptionnel de sites paléolithiques et le large vivier de préhistoriens en Chine, relancent aujourd'hui une stimulante discussion d'ordre épistémologique qui rediscute de l'apport conceptuel de la technologie lithique héritée de l'École française et de son champ d'application en Asie de l'Est.

Paleolithic research in China took off during the interwar period, following French pioneering work in North China. In 1920, for the first time in China, Father Émile Licent found threechipped stonesfrom the loess layers in Qingyang, northwest of the country. The following years were marked by the discovery of many sites under the leadership of a Franco-Chinese team made up, on the French side, of Émile Licent and Pierre Teilhard de Chardin. Some of these sites have since become prestigious international references for prehistory and paleoanthropology, such asZhoukoudian, Salawusu, Nihewan andShuidonggou. One of the founders of the Paleolithic discipline in China, Prof. Pei Wenzhong, even obtained his doctorate in France in1937 at the IPH, under the direction of Mr. Henri Breuil, then “Pope of Prehistory”. This also explains the very strong academic and disciplinary link between China and France: a long common scientific history thatcontinues today in cooperation with the National Museum of Natural History. Following major social and political upheavals that marked New China between 1949 to 1978, scientific exchanges with Western countries came to a halt. During this period, research in prehistory regained autonomy, independenceand refocused around morpho-descriptive studies of lithic industries.It was not until the last two decades of the twentieth century and the reopening of China to the Westthat French researchers could be invited again and transmit the theoretical and practical contributionsof the Schools of A. Leroi-Gourhan (Paris1) and J. Tixier (Paris10-Nanterre).

Nearly twenty years have passed,and the impact of the French School is still relevant in the field of lithic technology with the use of key concepts such as“chaîne opératoire”, the “diacriticaldiagram”, "conceptual diagram", "raw materialeconomy"and “debitage economy”. More recently, the “techno-functionalanalysis” developed by Eric Boëda (Paris10-Nanterre) has been applied to Chinese sites between 2.6Ma and the Middle Holocene (Longgupo, Guanyingdong, Maomaodong, bifacailindustries, Hoabinhien, etc.). The applicationof this method has helped to clarify the diagnosis of sometimes very controversial issues;thatis why the French School has gained solid credit in the Chinese academic landscape.

However, if the concept of “chaîne opératoire” has been generally well accepted by the community of Chinese lithicians, the same is not true for the general orientation of technological studies “à la française” which are not unanimous. A lively scientific debate has emerged in recent years, between "quantitative" researchers and a new generation of "qualitativists" on topics as varied as: the relevance of the choice of methods, their relevance in the diagnosis of the stone artifacts. The exceptional reservoir of Paleolithic sites and the large pool of prehistorians in China, today relaunch a stimulating discussion of an epistemological order which rediscovers the conceptual contribution of the lithic technology inherited from the French School and its field of applicationin East Asia.


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