Session I - Manifestations artistiques et symboliques
Supports probables de la transmission des mythes, signes d'appartenance ou de statut au sein du groupe, les manifestations symboliques témoignent du lien discret manifestant la cohésion sociale et culturelle unissant, parfois sur de vastes espaces, les communautés humaines. Elles ouvrent, de fait, des voies d'interprétation sur les comportements humains et les structures de pensée autrement inexplicables.
Qu'elle soit paléolithique, mésolithique ou néolithique, sur parois rocheuses comme sur objets, l'imagerie préhistorique est fréquemment lacunaire. Les représentations sont souvent incomplètes voire réduites à des segments. Les objets sont régulièrement fragmentaires. Dans les sites d'art pariétal et rupestre, on constate de façon systématique la présence de parois qui n'ont jamais été utilisées tandis que de véritables palimpsestes recouvrent des panneaux voisins, parfois situés dans des endroits d'accès difficile. Le même phénomène de « vides » et « trop-pleins » graphiques se retrouve en art mobilier. Des biais de documentation peuvent en partie éclairer ces absences, qu'elles soient dues à des lacunes archéologiques ou à des processus taphonomiques. Bien évidemment, il nous manque le corpus des représentations éphémères, des traces de pratiques utilisant comme support des matériaux périssables (bois végétal, cuir, argile, graines, colorants végétaux), mais c'est là une difficulté qui est inhérente à toutes les spécialités de notre discipline. Il semble que cette fragmentation de l'image puisse également résulter de gestes anthropiques : involontaires pour certains (accident de réalisation, bris non intentionnel), intentionnels pour d'autres (synecdoque graphique, actes de fragmentation voire de destruction). Et que dire de l'absence de certains éléments du bestiaire alors que les vestiges fauniques indiquent leur présence dans l'environnement proche, ou qu'ils sont utilisés de manière sélective pour l'élaboration de parures ?
Comment interroger et interpréter ces manques graphiques ? Quelle est leur réalité archéologique ? Participent-elles de traditions culturelles ? Quelle est la portée symbolique ou sémantique de ces fragments d'images ? L'objectif de cette session vise ainsi à croiser et faire dialoguer approches taphonomiques, analyses technologiques et stylistiques, études contextuelles, contributions anthropologiques et réflexions épistémologiques dans un cadre chrono-culturel le plus large possible. Seul le croisement des approches multiples peut apporter un éclairage qui alimente les hypothèses d'interprétation et permette de passer ainsi du tracé isolé du geste graphique à la définition d'une tradition symbolique.