Session D - Les espaces vides : preuves d'absences ou absences de preuves ?
Les cartes de répartition de sites pré- et protohistoriques présentent bien souvent des densités très contrastées, avec des zones de semis serré côtoyant des quasi-déserts archéologiques. Partout ces déséquilibres suscitent les mêmes interrogations : reflètent-ils des réalités de peuplement, une conservation différentielle des gisements, un biais de prospection et de diagnostic des sites et des séries, voire simplement l'intensité plus ou moins grande de l'activité archéologique et de la diffusion des résultats ? Ces questions se retrouvent à toutes les échelles géographiques, de la plus locale (pourquoi, au sein d'un même territoire, certaines implantations de sites semblent-elles privilégiées ?) à la plus globale (pourquoi certaines parties du monde sont-elles surreprésentées dans l'écriture des grands scénarios de la préhistoire humaine ?). Plusieurs évolutions en cours depuis des années dans notre discipline ont changé notre manière d'aborder ces problèmes. Le développement des approches géomorphologiques a considérablement enrichi notre compréhension des potentialités de préservation des sites suivant leur contexte naturel. L'afflux de données issu de l'archéologie préventive, mais aussi le réexamen et de nouvelles datations mieux contrôlées de séries anciennes mal attribuées, ont modifié notre vision du peuplement ancien de nombreux territoires. Enfin, l'internationalisation de la recherche place désormais au premier plan de la pré- et protohistoire mondiale des régions jusque-là tenues pour marginales. Ce travail de déconstruction de nos lacunes géographiques nous rapproche paradoxalement de l'identification des « vrais » vides archéologiques : ceux qui résistent à l'analyse.