Hiatus, lacunes et absences : identifier et interpréter les vides archéologiques
31 mai-4 juin 2021 Toulouse (France)
Enquête sur une frontière technique de longue durée : le débitage par pression et ses relations avec les domaines industriels d'Asie du sud-ouest et du Proche-Orient méditerranéen (VIIe-IIIe millénaires)
Raphaël Angevin  2, 1@  
2 : Direction régionale des Affaires Culturelles d'Auvergne-Rhône-Alpes, Service régional de l'archéologie
Ministère de la Culture et de la Communication
4 rue Pascal, 63000 CLERMONT-FERRAND -  France
1 : UMR 7041 - ArScAn (VEPMO)  -  Site web
CNRS : UMR7041, Ministère de la Culture et de la Communication : Servicerégional de l'archéologie d'Auvergne-Rhône-Alpes

Le débitage laminaire par pression debout (Mode 4 sensu Pelegrin 2012) apparaît très répandu au Moyen-Orient entre le VIIe et le IIIe millénaire. Si les conditions chrono-culturelles de son déploiement demeurent mal connues, son extension ne semble toutefois intéresser qu'une portion de cet espace : de ce point de vue, la Basse-Mésopotamie se présente comme l'une des régions les plus occidentales où cette technique fut maîtrisée, tandis qu'elle est (presque) totalement absente de Haute-Mésopotamie et du Proche-Orient méditerranéen.

Rattachée au vaste domaine industriel d'Asie du sud-ouest, cette modalité d'exécution est par contraste solidement documentée en Asie centrale, dans l'Oural, en Crimée, dans le Caucase, en Anatolie centrale et orientale, dans le nord de l'Inde, au Pakistan, en Afghanistan, en Iran et en Irak du sud. A l'ouest de l'Euphrate (Levant sud et nord, Steppe syrienne, Taurus, Moyen Euphrate turc), les productions calibrées par percussion directe tendre minérale et – dans une moindre mesure – au punch dominent pour leur part les assemblages. Au sein de ces corpus, les seuls éléments détachés par pression correspondent à des témoignages allochtones, supports légers en obsidienne et, à partir du Ve millénaire, grandes lames de silex obtenues au levier (Mode 5 sensu Pelegrin 2012) selon des procédures éprouvées de longue date dans le Caucase et en Anatolie orientale. Cette géographie technique constitue une réalité de longue durée qui ne fut jamais profondément – et définitivement – remise en cause : ainsi, la « frontière » entre domaines industriels du Proche-Orient méditerranéen et d'Asie du sud-ouest semble s'être très tôt stabilisée en Mésopotamie centrale, au sud du Khabour et du Grand Zab. Entre 4300 et 2250 av. J.-C., plusieurs épisodes d'extension de ces traditions peuvent toutefois être rapportés, signalant des consensus techniques précaires (« globalisations ») à l'échelle du monde mésopotamien.

A partir des données recueillies sur les sites de Mari (Tell Hariri, Syrie) et Bash Tapa (Kurdistan d'Irak), cette communication se propose d'interroger le statut de la « frontière » technique mise en lumière, au IIIe millénaire, entre technocomplexe sumérien au sud – rattaché au domaine industriel d'Asie du sud-ouest – et technocomplexe cananéen au nord – dont l'organisation techno-économique révèle des affinités évidentes avec les industries du Proche-Orient méditerranéen.

En remontant aux racines de leurs systèmes techniques, il nous sera tout à la fois possible de mettre en lumière la stabilité de cette « frontière » et ses mouvements périodiques, alors même que les oscillations perçues au cours des périodes d'Obeid (Obeid récent : fin VIe-début Ve millénaire), d'Uruk (LC3-4 : second tiers du IVe millénaire) et du Dynastique archaïque III (second tiers du IIIe millénaire) recouvrent des recompositions sociales et culturelles de plus grande ampleur.


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