Le Rhin joue un rôle important dans la plupart des travaux consacrés à l'histoire des dynamiques de peuplement du nord de l'Europe. Le Fossé rhénan supérieur, dans lequel il s'écoule entre Bâle et Mayence, est notamment ponctué de vastes zones humides, dénommées "rieds", qui auraient structuré les différents groupes culturels de la Préhistoire et de la Protohistoire. Il a fait l'objet de nombreux travaux géomorphologiques au cours des deux dernières décennies, notamment grâce au développement de l'archéologie préventive. Toutefois, sa taille imposante, près de 12 000 km2, a dissuadé toute synthèse géomorphologique pouvant servir de cadre aux études régionales. Il est dès lors difficile d'apprécier la part de l'érosion et des dynamiques alluviales dans la conservation et la localisation des sites archéologiques.
Un quart du Fossé rhénan est localisé en Alsace, qui peut constituer un premier échantillon pour réfléchir aux biais taphonomiques régionaux et pour reconstituer les dynamiques de peuplement au cours du Néolithique et de la Protohistoire. La synthèse récente des données géomorphologiques permet notamment de définir les espaces de divagation des différents cours d'eau (Rhin, Ill...) et met en lumière la mobilité des zones humides au cours du temps. Elle montre également que si des premiers indices d'érosion sont notés dès le Néolithique, les bassins-versants ne connaissent pas de métamorphose radicale avant le Premier âge du Fer. En parallèle, l'étude des cartes de répartition des sites archéologiques de différentes périodes du Néolithique et de la Protohistoire relativise la part des biais taphonomiques qui sont surtout marqués dans certaines portions des plaines alluviales. La confrontation des données géomorphologiques et archéologiques permet au final de commencer à démêler la part des contraintes environnementales et des choix culturels dans les dynamiques observées.