Dans la continuité des grands découpages chronoculturels hérités des travaux de Breuil et Laplace, la vallée du Rhône est traditionnellement perçue comme un espace « frontière » séparant deux « provinces préhistoriques » à la fin du Pléistocène. Ce cadre fixé sur la base d'études typologiques des seules industries lithiques, a par la suite conditionné la construction des aires de recherche, et relève aujourd'hui davantage du postulat que du fait démontré.
Les recherches menées ces dernières décennies dans la vallée du Rhône et ses marges laissent entrevoir une réalité plus complexe de la géographie culturelle des groupes humains du Dernier Maximum Glaciaire à l'Holocène. Ces acquis invitent à une réflexion de fond qui se heurte aux nombreuses lacunes documentaires qui subsistent encore autour des contextes archéologiques de part et d'autre du Rhône. Le dépassement de ce blocage engage plusieurs étapes incontournables :
- Un retour aux données primaires dans le cadre de travaux de terrain (prospections, fouilles) et d'études critiques de sites anciennement fouillés (réévaluation de collections et renouvellement des données radiocarbones).
- Un regard critique sur les entités chrono-culturelles reconnues en vallée du Rhône, à travers les repères chronologiques et la pertinence des critères de différenciation culturelle.
- L'intégration de données nouvelles notamment via l'étude des réseaux de transferts matériels.
Cette communication propose un bilan d'étape dans le cadre de cette démarche autour (1) d'une synthèse critique des connaissances acquises ; (2) de résultats récents de recherches menées sur les circulations de matériaux dans la vallée du Rhône et ses marges ; (3) des perspectives de recherche vis-à-vis des vides documentaires identifiés.
Malgré leur caractère préliminaire, ces résultats permettent de réinterroger la partition des groupes culturels et les interactions qui s'effectuent dans cette région à la fin du Paléolithique supérieur et dessinent autant de pistes de travail pour les années à venir.