La phase récente du Solutréen est marquée par des changements techno-économiques importants du système technique lithique, principalement à travers le développement de nouveaux outils. Il s'agit de pointes lithiques originales (feuilles de laurier, pointes à cran, feuilles de saule, pointes à ailerons et pédoncules, etc.) qui constituent l'une des principales spécificités du système technique solutréen. Leur confection résulte de schémas opératoires fortement investis techniquement et économiquement ayant parfois intégré des solutions techniques nouvelles, telles que le traitement thermique des roches siliceuses et la systématisation de la retouche par pression.
La question de l'apprentissage de ces techniques n'a que peu été évoquée pour le Solutréen. Les études autour des savoir-faire se sont concentrées principalement sur les « experts » et les performances techniques associées. L'analyse des pointes bifaciales, aux dimensions et à la régularité parfois remarquables, a notamment régulièrement accaparé l'intérêt des préhistoriens. Pourtant le degré d'habileté relatif à la confection de ces types d'outils nécessite vraisemblablement un apprentissage long et multiple des schémas opératoires et techniques associées. L'apprentissage de ces techniques et les différents niveaux d'habiletés des tailleurs doivent pouvoir s'observer dans le registre archéologique et se traduire par une variabilité des productions lithiques.
Dans ce cadre, le gisement de plein air du Landry (Boulazac, Dordogne) nous fournit un cadre privilégié. Il s'agit de l'un des très rares sites solutréens de plein air fouillés ces vingt dernières années dans le sud-ouest de la France. La très bonne conservation des vestiges archéologiques a permis d'identifier et de documenter différentes activités de production et de consommation au sein d'un niveau stratigraphique unique. Les activités de taille menées sur place y sont documentées par des milliers de déchets lithiques.
Nous nous proposons de présenter une partie du travail mené sur le mobilier lithique du Landry ayant révélé différents degrés de technicité dans le cadre des activités de taille. La reconnaissance et la description des différents niveaux d'habileté technique ont été réalisées à travers l'apport des remontages et de l'expérimentation, mais aussi grâce à l'élaboration d'une grille d'évaluation qualitative. Cette étude nous permet de discuter de la composition sociologique du groupe de Landry et plus largement des systèmes de mobilité des groupes solutréens du Sud-ouest français.