L'Épigravettien a été défini dans les années 1960 pour rendre compte de l'originalité des industries lithiques postérieures au Gravettien en Italie. L'extension progressive de cette entité à une grande partie de l'Europe méditerranéenne et orientale s'est également appuyée essentiellement sur les industries lithiques.
Au cours des dernières décennies, le développement de l'approche technologique dans l'étude des industries lithiques, associé à une meilleure prise en compte des contextes archéologiques et des séquences stratigraphiques, a fortement renouvelé la perception de l'Épigravettien, de sa sériation et de son emprise chrono-géographique. Dans plusieurs régions, des travaux portant sur les transferts lithiques documentent des réseaux de déplacement et de contact s'établissant à différentes échelles.
En parallèle, les recherches portant sur d'autres domaines techniques et culturels ont considérablement progressé au cours des dernières décennies et ont concerné des matériaux variés (parures, faunes, art pariétal et mobilier, sépultures...). Pourtant, ces recherches ont été généralement menées à l'intérieur du cadre fixé par les industries lithiques et n'ont que rarement conduit à une rediscussion de ce dernier.
Dans cette communication, nous proposons une première tentative de synthèse des données acquises et nous tentons de poser les bases d'un dialogue non hiérarchisé entre ces différents domaines de la culture matérielle. Cette position nous conduit à éprouver d'abord la consistance de l'entité épigravettienne en dehors des seules pratiques techniques lithiques et à évaluer les recouvrements et les écarts existant entre les séquences de changements identifiés au sein des différentes composantes des systèmes techniques.
Cette discussion est menée en s'appuyant d'abord sur un noyau de connaissances établies autour de deux grands domaines géographiques : le nord-est de l'Italie et l'arc liguro-provençal. Nous élargissons ensuite la réflexion vers le sud et vers l'est. Chronologiquement, notre propos embrasse la durée de l'Épigravettien (entre ca. 20 ka cal. BP et 11,5 ka cal. BP), mais se concentrera sur certains épisodes critiques ou des changements forts sont perceptibles dans les pratiques culturelles de populations épigravettiennes.