L'expression schématique dite post-glaciaire et attribuée au Néolithique est présente de la Péninsule ibérique au Piémont italien et documentée par plus de 130 sites en France méditerranéenne et dans les Alpes occidentales. L'interaction entre homologies (usage du schématisme, et par conséquent d'un même registre cognitif, choix de contextes environnementaux semblables, mobilisation d'un répertoire iconographique cohérent et associations récurrentes) et variabilité régionale (thèmes graphiques propres à certains secteurs) invite à considérer cette expression graphique comme un vecteur pertinent dans la compréhension du paysage culturel néolithique et des dynamiques qui l'ont affecté. ll s'agit en effet d'un corpus graphique présentant une vaste distribution géographique transcendant la diversité des groupes culturels tout en y étant sensible par certains aspects. Il est l'empreinte de pratiques et récits partagés. L'expression schématique néolithique semble ainsi en mesure d'apporter une contribution complémentaire à la modélisation des interactions culturelles intra et extra-régionales et à la définition des composantes culturelles et leur articulation dans l'espace. La démarche mobilisée pour répondre à une telle problématique est intégrée et multiscalaire.
Toutefois, hiatus, lacunes et absences de nature différentes caractérisent chacune des échelles d'analyse, de la paroi à la Méditerranée nord-occidentale. Les peintures rupestres présentent un avantage certain : leur localisation est immuable et elles sont découvertes dans le lieu, l'espace de la socialisation duquel elles témoignent. Cependant, majoritairement peintes en abris de plein air, leur préservation est largement partielle. Parois, complexes de sites et massifs sont comme des puzzles dont seules quelques pièces nous seraient parvenues. A une échelle plus large, la distribution spatiale des abris peints reflète probablement davantage l'implantation géographique des chercheurs qu'une quelconque réalité archéologique. Finalement, ces peintures ne sont pas directement datables et les abris sont majoritairement privés de contextes archéologiques. Toutefois, ces vides archéologiques font partie intégrante des données et plus largement de la discipline et ne doivent pas priver l'archéologie néolithique de la contribution de l'un des plus grands corpus graphiques européens. L'approche intégrée est ici mobilisée pour tenter de combler certaines lacunes, pour caractériser ces vides, redonner un sens aux discontinuités spatiales observées à chaque échelle, les mobiliser dans la compréhension du phénomène étudié et par là-même dans la restitution d'une géographie culturelle du Néolithique européen.